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dans un tranquille Elysée ; et le lendemain, à la naissance du jour, il se lève, il aide à Hypérion à atteler ses coursiers à son char, et il suit la même carrière, pendant le cours éternel de l’année, dans la chaîne d’un travail utile, jusqu’à son tombeau. Aux vaines grandeurs près, ce misérable, dont les jours se succèdent dans les travaux, et les nuits dans le repos, aurait l’avantage sur le monarque. Le dernier des sujets, membre qui contribue à la paix de sa patrie, en jouit ; et dans son cerveau grossier, le paysan ne sait guère combien de veilles il en coûte au roi pour maintenir cette paix, dont il goûte mieux les douces heures !

(Entre Erpingham.)

Erpingham. — Mon prince, vos lords, impatients de votre absence, parcourent le camp pour vous rencontrer.

Le roi. — Mon bon vieux chevalier, va les rassembler dans ma tente ; j’y serai avant toi.

Erpingham. — Je vais remplir vos ordres, sire.

(Il sort.)

Le roi. — O Dieu des batailles ! fortifie le cœur de mes soldats ! Écarte d’eux la peur ! Ote-leur la faculté de compter le nombre de leurs ennemis. Ne leur enlève pas aujourd’hui leur courage, ô Seigneur ! oh ! pas aujourd’hui ! ne te souviens point de la faute que mon père a commise pour saisir la couronne ! J’ai rendu de nouveaux honneurs aux cendres de Richard, et j’ai versé sur lui plus de larmes de repentir que le coup mortel n’a fait sortir de son sein de gouttes de sang : j’entretiens d’une aumône journalière cinq cents pauvres qui, deux fois le jour, lèvent vers le ciel leurs mains flétries, et le prient de pardonner le sang répandu : j’ai bâti deux chapelles, où des prêtres austères entonnent leurs chants solennels pour le repos de l’âme de Richard ; je ferai plus encore, quoique, hélas ! tout ce que je peux faire ne soit d’aucune valeur, et le repentir vient encore implorer de toi le pardon.

(Entre Glocester.)

Glocester. — Mon souverain !