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quand quelques-unes de vos forfanteries seraient démontrées.

Le dauphin. — Ne fera-t-il donc jamais jour ? — Je veux trotter demain l’espace d’un mille, et que mon chemin soit pavé de faces anglaises.

Le connétable. — Moi je n’en dirai pas autant de peur qu’on ne me fît en face l’affront de me démentir ; mais je voudrais en effet de tout mon cœur qu’il fît jour, pour bien frotter les oreilles aux Anglais.

Le dauphin. — Qui veut courir avec moi le risque de leur faire une vingtaine de prisonniers ?

Le connétable. — Il faut que vous commenciez par vous exposer au risque de l’être vous-même.

Le dauphin. — Allons, il est minuit : je vais m’armer.

(Il sort.)

Le Duc d’Orléan. — Le dauphin soupire après le jour.

rambure. — Il meurt d’envie de manger les Anglais.

Le connétable. — Je crois qu’il peut bien manger tous ceux qu’il tuera.

Le Duc d’Orléan. — Par la blanche main de ma dame, c’est un aimable prince.

Le connétable. — Jurez plutôt par son pied, afin qu’elle puisse d’un pas effacer le serment.

Le Duc d’Orléan. — Tout ce qu’on peut dire de lui, c’est que c’est peut-être l’homme de France le plus actif.

Le connétable. — Agir c’est être actif, et il sera toujours agissant.

Le Duc d’Orléan. — Je n’ai jamais ouï dire qu’il ait fait de mal à personne.

Le connétable. — Et je vous jure qu’il ne commencera pas encore demain ; il conservera cette bonne réputation.

Le Duc d’Orléan. — Je sais qu’il a du courage.

Le connétable. — Je me suis laissé dire la même chose par quelqu’un qui le connaît mieux que vous.

Le Duc d’Orléan. — Qui cela ?

Le connétable. — Pardieu ! c’est lui-même qui me l’a dit, et il a ajouté qu’il ne se souciait pas qu’on le sût.

Le Duc d’Orléan. — Il n’a pas besoin de cette précaution ; son mérite n’est point caché.