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Scène IV

France. — Appartement dans le palais du roi de France. Entrent LE ROI, LE DAUPHIN, LE DUC DE BOURGOGNE, LE CONNÉTABLE, et suite. Fanfares.

Le roi de France. — Ainsi l’Anglais s’avance contre nous avec une armée nombreuse. Il est important de lui répondre par une défense digne de notre trône. Les ducs de Berry, de Bretagne, de Brabant et d’Orléans vont partir ; et vous aussi, dauphin, pour visiter, réparer et fortifier nos villes de guerre, les pourvoir de braves soldats, et de toutes les munitions nécessaires ; car l’Angleterre s’approche avec une violence égale à celle d’eaux qui se précipitent vers un gouffre. Il est donc à propos de prendre toutes les mesures que la prévoyance et la crainte nous conseillent, à la vue des traces récentes qu’a laissées sur nos plaines l’Anglais fatal à la France, qui l’a trop méprisé.

Le dauphin. — Mon auguste père, il convient, sans doute, de nous armer contre l’ennemi. La paix elle-même, quand la guerre serait douteuse, et qu’il ne s’agirait d’aucune querelle, la paix ne doit jamais assez endormir un royaume, pour dispenser de lever, d’assembler des troupes, d’entretenir les places fortes, et de faire tous les préparatifs comme si l’on était menacé d’une guerre : c’est d’après ce principe que je dis qu’il est à propos que nous partions tous pour visiter les parties faibles et endommagées de la France ; mais faisons-le sans montrer aucune alarme. Non, sans plus de crainte que si nous apprenions que l’Angleterre fût en mouvement pour une danse moresque de la Pentecôte ; car, mon respectable souverain, l’Angleterre a sur son trône un si pauvre roi, son sceptre est le jouet d’un jeune homme si frivole, si extravagant, si superficiel, qu’elle n’est pas dans le cas d’inspirer la crainte.

Le connétable. — Ah ! doucement, prince dauphin : vous vous méprenez trop sur le caractère de