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Oswald. – Et pourquoi me traites-tu ainsi ? Je ne te connais pas.

Kent. – Et moi, compagnon, je te connais.

Oswald. – Et pour qui me connais-tu ?

Kent. – Pour un fripon, un bélître, un mangeur de restes, un vil et orgueilleux faquin, un mendiant, habillé gratis, à cent livres de gages ; un drôle aux sales chausses de laine, un poltron, une espèce qui porte ses querelles devant le juge ; un délié fripon de bâtard, officieux, soigneux ; un coquin qui hérite d’un coffre, un gredin qui serait entremetteur par manière de bon service, qui n’a en lui que de quoi faire un maraud, un pleutre, un lâche, un pendard ; le fils et héritier d’une chienne dégénérée, et que je ferai geindre à coups de fouet si tu t’avises de nier la moindre syllabe de ce que j’ajoute à ton nom.

Oswald. – Quelle étrange espèce d’homme es-tu donc, de venir accabler d’injures quelqu’un qui ne te connaît pas et que tu ne connais pas ?

Kent. – Et toi, quel effronté valet es-tu donc, de dire que tu ne me connais pas ? Est-ce qu’il s’est passé deux jours depuis que je t’ai pris aux jambes et que je t’ai battu en présence du roi ? — L’épée à la main, fripon. Il est nuit, mais la lune brille : je vais te tailler en soupe au clair de la lune. L’épée à la main, indigne canaille de bâtard ; l’épée à la main. Il tire son épée.

Oswald. – Laisse-moi, je n’ai rien à démêler avec toi.

Kent. – Tirez donc, gredin. Vous venez apporter des lettres contre le roi, et prenez le parti de mademoiselle Vanité contre son royal père. L’épée à la main, drôle,