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s’attend à chaque instant à voir paraître le corps d’armée.

Edgar. – Je vous remercie, monsieur ; c’est tout.

Le gentilhomme. – Bien que des raisons particulières arrêtent ici la reine, son armée est en mouvement.

Edgar. – Je vous remercie, monsieur.

Le gentilhomme sort.

Glocester. – Vous, ô dieux toujours cléments, retirez-moi la vie, et ne permettez pas que mon mauvais génie vienne encore me tenter de mourir avant que ce soit votre bon plaisir.

Edgar. – Vous priez bien, mon père !

Glocester. – Mais vous, mon bon monsieur, qui êtes-vous ?

Edgar. – Le plus pauvre des hommes, dompté par les coups de la fortune, et que l’apprentissage des chagrins qu’il a connus et ressentis a rendu susceptible d’une douce pitié. Donnez-moi votre main ; je vous conduirai vers quelque asile.

Glocester. – Je te remercie du fond du cœur : puissent la bonté et la bénédiction du ciel te le rendre.

Entre Oswald.

Oswald. – Ah ! voici une heureuse capture ! Il a été mis à prix – La chair et les os de ta tête aveugle ont été fabriqués, je crois, pour faire ma fortune – Vieux, malheureux traître, recueille-toi bien vite ; l’épée qui doit te détruire est levée.

Glocester. – Que ta main secourable lui prête pour cela la force nécessaire.

Edgar se met entre eux deux.

Oswald. – Pourquoi, rustre audacieux, oses-tu soutenir un traître mis à prix ? Ote-toi de là, de peur que la contagion de sa destinée ne s’empare également de toi. Quitte son bras.

Edgar, en langage gallois – Che n’le quitterai pas, monchieur, sans en savouer des meilleures résons.

Oswald. – Quitte-le, misérable, ou tu es mort.

Edgar. – Mon pon chentilhomme, âllez vout’ chémin, et laissez pâsser le pouv’ monde. Si ch’ âvais été pour