passant
l’équinoxiale de Queubus : cela était excellent, en vérité ; je t’ai
envoyé douze sous pour ta bonne amie ; les as-tu reçus ?
LE BOUFFON.--Oui, j’ai remis ta gracieuseté à mon jupon court ; car le
nez de Malvolio n’est pas un manche de fouet[31] ; madame a la main
blanche, et le myrmidon n’est pas un bouchon.
[Note 31 : À whipstock, il a l’odorat fin.]
SIR ANDRÉ.--Excellent ! c’est la plus jolie folie pour la fin. Allons,
une chanson.
SIR TOBIE.--Avance ; voilà douze sous pour toi ; chante-nous une chanson.
SIR ANDRÉ.--Voilà encore un teston de moi ; si un chevalier donne….
LE BOUFFON.--Voudriez-vous une chanson d’amour, ou une chanson morale ?
SIR TOBIE.--Une chanson d’amour, une chanson d’amour !
SIR ANDRÉ.--Oui, oui ; je ne me soucie point de morale.
LE BOUFFON chante.
O ma maîtresse ! où êtes-vous errante ?
Arrêtez et m’écoutez : Votre sincère amant s’avance,
Votre amant qui peut chanter haut ou bas.
Ne trotte pas plus loin, mon cher cœur :
Les voyages finissent par la rencontre des amants,
C’est ce que sait le fils de tout homme sage.
SIR ANDRÉ.--Admirable, en vérité !
SIR TOBIE.--Bien, très-bien.
LE BOUFFON.
Qu’est-ce que l’amour ? Il n’est pas fait pour l’avenir.
La joie présente fait rire dans le présent ;
Ce qui est à venir est encore incertain ;
Il n’y a point de moisson à recueillir des délais.
Viens donc, ma chérie, me donner vingt baisers,
La jeunesse est une étoffe qui ne peut durer.
SIR ANDRÉ.--Une voix douce comme du miel, aussi vrai que je suis
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