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tres.) Accompagnez-le, au nombre de quatre
ou cinq, tous même si vous voulez ; car pour moi, je ne me trouve jamais
mieux que quand je suis seul.--(À Viola.) Réussis dans ce message, et
tu vivras aussi indépendant que ton maître ; sa fortune sera la tienne.

VIOLA.--Je ferai donc de mon mieux ma cour à votre maîtresse.--(Le duc
sort.) Lutte remplie d’obstacles ! Quel que soit mon rôle en lui faisant
ma cour, je voudrais, moi, devenir la femme du duc.

(Tous sortent.)

SCÈNE V
Appartement de la maison d’Olivia.

MARIE et LE BOUFFON.

MARIE.--Allons, dis-moi où tu as été, ou je n’ouvrirai pas assez mes
lèvres pour qu’un crin puisse y entrer, dans le but de t’excuser ; ma
maîtresse te fera pendre pour t’être absenté.

LE BOUFFON.--Eh bien ! qu’elle me pende ; quiconque est bien pendu dans ce
monde n’a plus rien à redouter.

MARIE.--Compte là-dessus.

LE BOUFFON.--Il ne voit plus personne à craindre.

MARIE.--Bonne réponse de carême[19] ! Je puis t’apprendre l’origine de
ces mots.

[Note 19 : À lenten answer, réponse brève et misérable.]

LE BOUFFON.--D’où vient-il, bonne dame Marie ?

MARIE.--De la guerre ; et tu peux le dire hardiment dans tes folies.

LE BOUFFON.--Eh bien ! que Dieu donne la sagesse à ceux qui l’ont, et que
ceux qui sont fous fassent usage de leurs talents.

MARIE.--Mais tu seras pendu pour être resté si longtemps absent, ou tout
au moins renvoyé ; n’est-ce pas la même chose pour toi que d’être pendu ?

LE BOUFFON.--Vraiment, une bonne pendaison prévient