dis accoste, je veux dire envisagez-la, abordez-la, faites-lui votre cour, attaquez-la.
SIR ANDRÉ.--Sur ma foi, je ne voudrais pas l’attaquer ainsi en compagnie. Est-ce là le sens du mot accoste ?
MARIE.--Portez-vous bien, messieurs.
SIR TOBIE.--Si tu la laisses partir ainsi, sir André, puisses-tu ne jamais tirer l’épée !
SIR ANDRÉ.--Si vous partez ainsi, mademoiselle, je ne veux jamais tirer l’épée. Belle dame, croyez-vous avoir des sots sous la main ?
MARIE.--Monsieur, je ne vous ai pas sous la main.
SIR ANDRÉ.--Par ma foi, vous allez l’avoir tout à l’heure, car voici ma main.
MARIE.--Maintenant, monsieur, la pensée est libre. Je vous prie de porter votre main à la baratte au beurre, et laissez-la boire.
SIR ANDRÉ.--Pourquoi, mon cher cœur ? quelle est votre métaphore ?
MARIE.--Elle est sèche, monsieur[11].
[Note 11 : Peut-être pour dire : elle est vide ; ou bien, d’après la chiromancie, une main sèche signifie ici une constitution froide.]
SIR ANDRÉ.--Comment donc ! je le crois bien ; je ne suis pas assez âne pour ne pas tenir ma main sèche. Mais que signifie votre plaisanterie ?
MARIE.--C’est une plaisanterie toute sèche, monsieur.
SIR ANDRÉ.--En avez-vous beaucoup de semblables ?
MARIE.--Oui, monsieur, je les ai au bout de mes doigts : allons, je laisse aller votre main, je suis desséchée[12].
(Marie sort.)
[Note 12 : I am barren.]
SIR TOBIE.--Chevalier, tu as besoin d’une coupe de vin des Canaries ; je ne t’ai jamais vu si bien terrassé.
SIR ANDRÉ.--Jamais de votre vie, je pense, à moins que vous ne me voyez terrassé par le canarie. Il me semble qu’il y a des jours où je n’ai pas plus d’esprit qu’un chrétien ou qu’un homme ordinaire. Mais je suis un grand mangeur de bœuf, et je crois que cela fait tort à mon esprit.
SIR TOBIE.--Il n’y a pas de doute