Par Notre-Dame, seigneur, je ne puis aller plus loin ; mes vieux os sont brisés ; nous avons fait immensément de chemin dans notre marche tantôt directe, tantôt sinueuse ; avec votre permission, je vais me reposer.
Mon vieil ami, je ne puis vous blâmer ; je suis fatigué moi-même au point que mes esprits en sont engurdis ; asseyez-vous, et vous reposez. Ici je vais dépouiller mes espérances et leurs décevantes illusions ; il est noyé celui que nous cherchons ainsi, et la mer se rit de nos inutiles investigations sur terre. Eh bien, j’y renonce.
Je suis charmé de lui voir abjurer tout espoir. {Bas, à Sébastien.) Je pense qu’un premier échec ne vous a pas fait abandonner votre projet.
Nous mettrons comme il faut à profit la première occasion favorable.
Que ce soit cette nuit ; car, fatigués de la marche, ils ne voudront et ne pourront pas user d’autant de vigilance que lorsqu’ils sont dispos.
Cette nuit, soit : n’en parlons plus.
On entend les sons d’une musique majestueuse et surnaturelle. Prospéro domine invisible toute la scène. Entrent plusieurs figures bizarres qui apportent un banquet ; elles forment autour de la table une danse, entremêlée de saluts bienveillants, invitent le roi et ceux de sa suite à manger, puis disparaissent.
Quelle est cette harmonie, mes bons amis ? écoutez !
C’est une musique merveilleusement suave.
Anges du ciel, protégez-nous ! Quelles étaient ces créatures-là ?
Des marionnettes vivantes ; je croirai maintenant qu’il y a des unicornes ; qu’en Arabie il est un arbre unique qui sert de trône au phénix, et qu’aujourd’hui encore un phénix y règne.
Je crois l’un et l’autre ; s’il est quelque chose qui passe toute créance, venez à moi, et je jurerai qu’elle est vrai : quoi qu’en puissent dire au coin de leur feu des imbéciles, jamais les voyageurs n’ont menti.
Me croirait-on, si je racontais à Naples ce que nous venons de voir, si je disais que j’ai vu des insulaires (car ce ne peuvent être que des habitants de cette île) qui, sous des