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aussi grossier ? Quoi ! un bouquin gallois m’a pris pour dupe ! je me suis laissé coiffer d’un bonnet de fou de drap welche ! Il ne me reste plus qu’à m’étrangler avec un morceau de fromage mou.

EVANS. On ne doit pas donner du fromage au beurre, et votre ventre est de beurre.

FALSTAFF. Fromage et beurre ! Ai-je donc vécu jusqu’à ce jour pour me voir le jouet d’un cuistre qui met la langue anglaise en friture ? C’en est assez pour dégoûter à tout jamais, en Angleterre, de la paillardise et de l’inconduite.

Mme PAGE. Lors même que nous aurions mis la vertu à la porte de nos cœurs par les deux épaules, et nous serions damnées sans scrupule, croyez-vous donc, sir John, que le diable lui-même aurait pu nous amouracher de vous ?

FORD. Le beau ragoût, vraiment ! une balle de laine !

Mme PAGE. Un homme poussif.

PAGE. Vieux, glacé, flétri, et d’un ventre intolérable.

FORD. Et qui a une langue de Satan.

PAGE. Pauvre comme Job.

FORD. Et aussi méchant que sa femme.

EVANS. Et adonné aux fornications, aux tavernes, au vice, aux liqueurs fortes, à l’hydromel ; toujours buvant, jurant, insolent et tapageur.

FALSTAFF. Fort bien, je suis livré à vos sarcasmes ; vous avez barres sur moi ; je suis démoralisé ; je ne suis pas même en état de répondre à ce welche imbécile : l’ignorance elle-même a beau jeu contre moi ; faites de moi ce qu’il vous plaira.

FORD. Mon bel ami, nous allons vous conduire à Windsor, à un certain monsieur Brook à qui vous avez escroqué de l’argent, et dont vous deviez être l’entremetteur : parmi toutes vos tribulations, la plus cruelle sera d’avoir à rembourser cette somme.

Mme FORD. Non, mon ami ; que cela serve à le dédommager un peu de ce qu’il a souffert : laissez-lui cet argent, et nous serons tous amis.

FORD. Soit ; voilà ma main : tout est pardonné.

PAGE. Rappelez votre gaieté, chevalier. Je vous régalerai ce soir d’un posset ; je vous engagerai alors à rire de ma femme,