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CERVEAUVIDE. Je vous suis, mon hôte, je vous suis. — Mille bonjours, monsieur Page ! voulez-vous venir avec nous, monsieur Page ? Nous avons un divertissement qui nous attend.

L’HOTE, à Cerveauvide. Dites-lui ce que c’est, mon juge, dites-lui ce que c’est.

CERVEAUVIDE, à Page. Figurez-vous qu’il doit y avoir un duel entre sir Hugues, le ministre gallois, et Caïus, le médecin français.

FORD, à l’Hôte. Mon hôte de la Jarretière, j’aurais un mot à vous dire.

L’HOTE. Que me voulez-vous, mon brave ?

Ford l’emmène à quelque distance.

CERVEAUVIDE, à Page. Voulez-vous venir voir cela avec nous ? Ils ont choisi pour témoin mon hôte de la Jarretière ; et il paraît qu’il leur a donné à chacun un rendez-vous différent ; car, à ce qu’on m’assure, le ministre ne plaisante pas, et il y va de franc jeu. Venez, je vous conterai tout cela.

L’HOTE, à Ford. Vous n’avez point de démêlé judiciaire avec mon hôte le chevalier ?

FORD. D’aucune sorte, je vous proteste ; mais je vous donnerai un flacon d’excellent vin, si vous voulez me présenter à lui, et lui dire que je m’appelle Brook[1]. Il s’agit d’une plaisanterie.

L’HOTE. Votre main, mon brave ; vous aurez vos entrées et vos sorties ; êtes-vous content ? et votre nom sera Brook. Partons-nous, camarades ?

CERVEAUVIDE. Je suis à vous, mon hôte.

PAGE. J’ai entendu dire que ce Français manie habilement sa rapière.

CERVEAUVIDE. Bah ! de mon temps j’aurais pu vous en dire davantage ; aujourd’hui vous vous prévalez de vos distances, vos passes, vos estocades, et je ne sais quoi encore. C’est au cœur, monsieur Page, c’est là, c’est là qu’il faut atteindre. J’ai vu le temps où, avec ma longue épée, je vous aurais fait fuir quatre grands gaillards comme des lapins.

L’HOTE. Eh bien, mes enfants, partons-nous ?

PAGE. Je vous suis : j’aime mieux les voir tempêter que se battre.

L’Hôte, Cerveauvide et Page s’éloignent.
  1. Prononcez Brouk.