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LA TRAGÉDIE DE LOCRINE.

Trompart rentre avec Dorothée.
dorothée.

Salut, signor Strumbo. J’ai reçu votre lettre par votre homme ici présent, qui m’a fait un lamentable récit de vos angoisses ; et, apprenant ainsi combien était grande votre passion, je suis venue ici bien vite.

strumbo.

Oh ! ma chère pouponne, la fécondité de mon intellect n’est pas assez grande pour pouvoir vous dire les lamentables sanglots que j’ai poussés, les insomnies que j’ai subies pour l’amour de vous ; je vous prie donc de me recevoir dans votre familiarité :

Car votre amour est
Aussi voisin et aussi proche
Du fond de mon cœur
Que mon œil l’est de mon nez,
Ma jambe de mes chausses,
Et ma chair de ma peau.

dorothée.

Morguienne, maître Strumbo, vous parlez trop savamment pour que je comprenne votre pensée ; exprimez vous donc en termes clairs, et laissez-là vos ténébreuses énigmes.

strumbo.

Hélas ! mistress Dorothée, tel est mon malheur que je ne puis être compris quand je voudrais le plus l’être ; en sorte que mon grand savoir est pour moi un inconvénient. Mais, pour parler en termes nets, je vous aime, mistress Dorothée ; daignez seulement n’admettre dans votre familiarité.

dorothée.

Si c’est la tout, j’y consens.