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SCÈNE I.

greene.

— J’ai ouï dire que votre mari a récemment obtenu, — par lettres patentes du roi, — la concession générale de toutes les terres — de l’abbaye de Feversham, en sorte que toutes les concessions antérieures — sont annulées. Comme moi-même j’en avais une, — mon titre serait par là mis à néant. — Voilà tout, mistress Arden ; est-ce vrai ou non ?

alice.

— C’est vrai, maître Greene, les terres sont désormais en sa possession ; — et tous les baux qui existaient auparavant — sont nuls pour tout le temps que vivra maître Arden. — Il a la concession sous le sceau de la chancellerie.

greene.

— Pardonnez-moi, mistress Arden, il faut que je parle, — car je suis lésé ! Votre mari me fait tort, — en m’extorquant le petit bien que j’ai. — Cette terre est ma vie, c’est tout — ce qui me reste de me fortune. — Maître Arden a au cœur un désir infini d’acquérir ; — il est avide, affamé incessamment de bénéfice ; — et peu lui importe que les jeunes gens mendient, — pourvu qu’il puisse grappiller et enfouir de l’or dans sa sacoche. — Eh bien, puisqu’il m’a pris mes terres, le souci que j’ai de la vie — est aussi mince qu’est grand le souci qu’il a de s’enrichir. — Dites-lui cela de ma part. Je me vengerai, — et de manière à lui faire souhaiter que les terres de l’abbaye — fussent restées toujours dans les mêmes mains.

alice.

— Hélas ! pauvre monsieur ! je vous plains. — Loin de moi le désir de voir ruiner qui que ce soit ! — Dieu sait que ce n’est pas ma faute. Mais il n’est point étonnant — qu’il soit dur envers les autres, quand il l’est envers moi. — Ah ! maître Greene, Dieu sait comme je suis traitée !