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INTRODUCTION.

C’est ainsi que s’est accru et que s’accroît toujours le Pseudo-Shakespeare. À côté des productions illustres publiées par l’in-folio de 1623, se sont étagées peu à peu, grâce à d’infatigables efforts, les compositions apocryphes, douteuses, hybrides, inégales, parfois admirables, souvent défectueuses, que des traditions diverses rattachent au génie souverain qui a transformé l’art du moyen âge. En regard des trente-cinq pièces légitimes du maître se sont entassés, pendant plus de deux siècles, seize ouvrages plus ou moins bâtards qui s’offrent désormais au jugement public pour être légitimés : Les Deux nobles parents, la Naissance de Merlin, Locrine, la Puritaine, lord Cromwell, Sir John Oldcastle, le Prodigue de Londres, une Tragédie dans l’Yorkshire, Périclès, le Joyeux diable d’Edmonton, Mucédorus, la Belle Emma, Édouard III, Arden de Feversham, George-à-Greene, Albumazar.

Si ces ouvrages étaient reconnus et adoptés comme les productions authentiques du maître, le théâtre shakespearien, augmenté de plus d’un tiers, devrait comprendre désormais au moins cinquante pièces. Toutes les éditions publiées jusqu’ici devraient être remaniées et complétées par l’addition de ces seize compositions jusqu’ici dédaignées. Locrine précéderait le roi Lear ; Cymbeline serait suivi de la Naissance de Merlin ; Sir John Oldeastle serait l’appendice de Henry IV, comme Lord Cromwell le serait de Henry VIII ; le Joyeux Diable d’Edmonton prendrait place, parmi les féeries, à côté du Songe d’une Nuit d’été, comme Albumazar, à côté de la Tempête ; Édouard III relierait le Roi Jean à Richard II ; Mucédorus et la Belle Emma figureraient, comme pièces pastorales, entre Peines d’amour perdues et Comme il vous plaira ; enfin, Arden de Feversham et une Tragédie dans l’Yorkshire graviteraient, comme drames domestiques, autour d’Othello. Cette révolution dans le monde créé par Shakespeare s’accomplira-t-