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dans toutes les parties de nos corps ; et si l’on pense à ce que nous avons dit de l’eau qui se partage dans les arbres, et du souffle des trompettes, des flûtes, et d’autres instruments semblables. Il pourrait arriver de même que la pomme n’eût qu’une seule qualité, et que néanmoins nous y en remarquassions plusieurs, à cause de la diversité des organes des sens, qui nous la font apercevoir.

On pourrait dire aussi que la pomme a peut-être plus de qualités qu’il ne nous paraît ; et voici comment. Imaginons-nous qu’un homme n’a depuis sa naissance que le toucher, l’odorat, et le goût, et qu’il est privé de l’ouïe et de la vue. Cet homme-là croira qu’il n’y a rien qui puisse être aperçu par la vue et par l’ouïe, et qu’il n’y a que les trois sortes de qualités qu’il aperçoit par ses trois sens. Il peut donc arriver que comme nous n’avons que cinq sens, nous n’apercevons de plusieurs qualités qui sont réellement dans la pomme, que celles que nos sens nous permettent d’y apercevoir ; et que plusieurs autres qualités de cette pomme pourraient tomber sous d’autres organes des sens, que nous n’avons pas : ce qui est cause que nous n’apercevons pas ces choses, qui seraient sensibles par le moyen de ces organes. Mais la nature (