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au sceptique quelque chose de semblable à ce qui arriva au peintre Apelle, dont on dit que, peignant un cheval, et voulant représenter l’écume de cet animal, cela lui réussit si mal, que désespérant de son entreprise, il jeta contre son tableau l’éponge, dont il se servait pour nettoyer ses pinceaux : il arriva, dit-on, que cette éponge, ayant atteint le cheval, en représenta fort bien l’écume. Les premiers sceptiques de même espéraient de pouvoir parvenir à l’Ataraxie, en jugeant au juste de la différence des choses qui s’aperçoivent par les sens, et de celles qui s’aperçoivent par l’entendement : mais n’ayant pu venir à bout de parvenir à rien de certain, ils s’arrêtèrent à l’Époque ; ils suspendirent leur jugement ; et aussitôt par un bonheur inespéré, l’Ataraxie suivit l’Époque, comme l’ombre suit le corps.

Nous ne croyons pas néanmoins, que le sceptique soit tout à fait tranquille, et exempt de toute fâcherie ; nous disons qu’il est inquiété par la nécessité de souffrir, qui lui vient du choc ou de l’action de certains objets extérieurs ; et nous avouons que quelquefois il souffre le froid, la soif et d’autres incommodités pareilles. Mais il faut remarquer qu’à l’égard de ces incommodités, le commun des hommes souffre doublement : premièrement parce qu’ils en sont tourmentés et secondement parce qu’ils croient qu’elles sont de