Page:Sevestre - Cyranette, 1920.djvu/93

Cette page a été validée par deux contributeurs.

toutes les épreuves qui l’attendent encore, conservera-t-elle intacte cette force nouvelle qui l’a si efficacement ranimée et qui continue de l’exalter ?

On verra bien.

En attendant, sa félicité plane assez haut pour qu’aucun chagrin ne l’y puisse atteindre. Et c’est heureux, car, avant l’intervention de M. le curé, Liette ne l’a guère ménagée, allant jusqu’à lui reprocher d’avoir cessé trop vite d’écrire à Robert, dont le silence, alors incompréhensible, s’explique très bien maintenant.

— Mais n’est-ce pas toi qui t’irritais de ne plus rien recevoir d’Italie ? a fait observer Nise. Tu ne voulais plus entendre parler de lui.

— Moi ? s’est mise à protester Liette, dont la mémoire offre de ces sortes de lacunes à l’occasion. Peux-tu bien dire ?

— La preuve en est, a rétorqué malicieusement Nise, que je lui ai écrit tout de même.

— Comment ! À mon insu ?

— Eh oui, puisque tu le boudais.

— Oh ! mais, je ne veux pas de cela, a déclaré Liette. À partir d’aujourd’hui, du reste, je ferai ma correspondance moi-même. Il n’en est que temps. Et puis mon doigt est guéri.

Son entretien avec l’abbé Divoire, sans aboutir précisément au résultat que celui-ci en espérait, a eu du moins pour effet d’engager Liette à rendre justice à son ainée. Obligée de reconnaître en son for qu’elle lui doit beaucoup et que la pauvrette est bien à plaindre, elle veut tenir sa promesse d’être bonne pour Nise. Elle l’a juré à M. le curé, et un serment, c’est sacré. Mais ces heureuses dispositions ne peuvent l’empêcher de voir ce qui est et Nise, pour elle, est une rivale. Oh ! une rivale bien effacée, bien modeste, bien peu à craindre sans doute. Une rivale qui est tout le contraire d’une intrigante et qui l’a surabondamment prouvé. Mais enfin une rivale tout de même et qui pourrait devenir dangereuse malgré elle, si Robert appre-