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sure. Mon erreur s’explique par celle des médecins. Trompés aux apparences, n’avaient-ils pas cru pouvoir délivrer le permis d’inhumer, alors que le pauvre garçon, pris d’une syncope, n’était que dans l’état cataleptique ? À la mise en bière, la position insolite des membres nous inquiétant, les infirmiers et moi, nous prîmes sur nous de surseoir à l’enterrement et de signifier nos doutes au major dont l’intervention énergique eut les plus heureux effets. Je m’empresse d’ajouter que, d’après lui, cette crise, qui aurait pu entraîner de si épouvantables conséquences, doit être considérée comme salutaire et qu’il estime Mr. Wellstone tout à fait hors de danger.

« Mais moi, quoique je n’aie à me reprocher qu’un excès de zèle, rien n’égale ma confusion de vous avoir écrit dans les termes où je l’ai fait hier, Si ce n’est l’immense allégresse dont mon cœur déborde à la pensée de pouvoir vous rassurer pleinement sur le sort du fiancé de Mlle Juliette Daliot. J’aurais voulu vous télégraphier de ne tenir aucun compte de ma dernière lettre. Hélas, nos bureaux de la zone des armées n’acceptent que les dépêches officielles. Mais comme cette lettre ne date que de vingt-quatre heures et que, dit-on, le contrôle militaire arrête souvent le courrier à la frontière, j’ai bon espoir que ceci puisse vous toucher à temps pour épargner toute émotion à Mlle Daliot.

« Quoi qu’il en soit, souffrez que je vous réitère mes plus sincères excuses, monsieur le curé. Vous pouvez dire à cette jeune fille que son fiancé ne l’oublie pas, qu’il va mieux et que, bientôt, il recommencera sans doute à lui envoyer directement de ses nouvelles… »

Ahuri, et Dieu sait qu’on le serait à moins, l’abbé Divoire reprend cinq ou six fois de suite sa lecture avant d’en croire ses yeux. Pour claires que soient les explications de sa correspondante, il s’y embrouille. Selon elle, qui dit vrai, les cachets de la poste en font foi, ce mot n’est parti qu’un jour