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— Liette !… Vite ! Une lettre !

Liette est en train d’achever sa toilette, opération délicate qu’elle fait souvent durer plus que de raison.

— Pour moi ? demande-t-elle en jetant un coup d’œil critique dans son miroir.

— Dame !

— De qui donc ?

— Devine.

— Ma langue au chat.

— Ça vient d’Italie.

— Ah ! dit tranquillement Liette. Ce doit être de Mr. Wellstone.

Elle décachette le pli, d’où elle extrait une carte illustrée, une vue sauvage des Dolomites.

— Oui, c’est bien de lui… Tout de même, il se décide ! Il y aura mis le temps ! Enfin, mieux vaut tard que jamais.

La « vue » ne paraît pas l’enchanter outre mesure. Des cimes neigeuses, aux arêtes vives ; un paysage alpestre et hivernal, on connaît cela en Savoie. Elle aurait mieux aimé quelque chose d’inédit.

Au verso de la carte, huit ou dix lignes d’une écriture ferme, aux grands jambages aristocratiques. Liette lit à mi-voix, devant Nise, qui l’écoute en s’agitant un peu :

« Mademoiselle et honorée petite marraine, votre filleul s’excuse en toute sincérité de n’avoir pu se rappeler plus tôt à votre bon souvenir. N’en accusez que ses tribulations et les exigences d’un service qui ne le laisse pour ainsi dire pas respirer, et ne lui refusez pas l’absolution qu’il sollicite de votre bienveillance.

« Comptant recevoir à son tour de vos nouvelles, il vous prie d’agréer, mademoiselle et honorée petite marraine, l’hommage de son souvenir le plus respectueux.

« P. S. — Ses respects également chez vous, s’il vous plaît. »