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CYRANETTE

Épilogue

Novembre 1918 !… Novembre 1919 !… Un an d’écart entre ces deux dates, dont l’une a vu s’essorer une âme naguère puérile, mais qui, grandie soudain par la souffrance et comme touchée de la grâce, a pu prendre place parmi les justes et les saintes. Douze mois bien longs, bien douloureux à maints égards pour ceux qui ont mis Liette en tombe et qui reviennent de faire le pèlerinage du petit oratoire à l’ombre duquel elle repose, sous la charmille, comme en un nid du bon Dieu. Mais aussi, à d’autres égards, douze mois bien employés en fortes et saines méditations.

Avant de mourir, à l’arrivée des siens à Oak Grove, Liette avait dit à Nise, confidentiellement :

— Ma chérie, un jour viendra, je le sais, où Robert te demandera de lui permettre de réparer mes torts envers toi. Ce jour-là, promets-moi de ne pas te dérober ?

Et à l’abbé Divoire, qui avait pu la confesser en pleine lucidité, avant de lui administrer les secours de la religion :

— Monsieur le curé, si vous voulez que je comparaisse sans crainte devant Notre Seigneur, promettez-moi de préparer papa et maman à ce que vous savez. Vous les y préparerez peu à peu, n’est-ce pas ? Nise aussi qui, autrement, ne prendrait peut-être pas sur elle de déférer à mon désir, bien qu’au fond il vienne à l’appui de ses vœux.

Liette a bien fait de tout prévoir et d’exprimer clairement sa volonté. Denise, au retour du cimetière, ne s’appuierait pas ainsi au bras de Robert, en levant sur lui un regard tendrement mélanco-