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CYRANETTE

Qu’à cela ne tienne. Mr. Wellstone compte louer tout un cottage là où l’on ira. On s’arrangera pour les y recevoir aussi hospitalièrement qu’à Oak Grove.

— Allons, dit le jeune homme, au revoir, chère petite chose. J’ai affaire, vous savez. Il me faut harceler l’avoué qui s’est chargé de la liquidation de mes biens.

D’ordinaire, quand il la quitte ainsi, ce n’est jamais qu’après une petite scène où, avec sa tyrannie d’enfant malade, elle lui reproche de la laisser à l’abandon. Mais telle est sa joie de la décision qu’il a prise de vendre ses terres que, cette fois, elle ne cherche pas à le retenir.

Good bye, darling… Dites à Mary de monter, voulez-vous ? Quand je la sonne, elle n’en finit pas de répondre à mes appels, et c’est agaçant. Je voudrais Pat aussi.

— Bon, dit Robert, comptez sur moi.

Par le fait, deux minutes après, bousculant la maid pour entrer plus vite, Patrick, un jeune fou de cocker irlandais, brun sur le dos, blanc sous le ventre, avec un poil crépu comme une laine, de larges oreilles tombantes, des yeux d’intelligence aux reflets presque humains, se précipite vers le fauteuil de sa maîtresse, autour de qui il gambade, saute et jappe, en lui léchant les mains et lui faisant mille amitiés, mille caresses.

— Doucement, Pat !… Vous me salissez, my boy ! Oh ! l’amour de toutou !

— Madame désire ? interroge la maid.

— Le courrier n’est pas arrivé ?

— Non, madame.

— Dieu que c’est long !… Il est souvent en retard le courrier, ne trouvez-vous pas, Mary ?

— Oui, madame, répond impassiblement la maid, qui a l’air d’une ordonnance plutôt que d’une chambrière, une ordonnance trop rompue au « drill » et au règlement militaire pour jamais sourire, jamais se départir d’une attitude martiale,