ger le moins du monde sa chère petite Liette, si vive, si enjouée, si spirituelle même quand elle s’y mettait ; tout en continuant d’être pour elle le plus empressé et le plus galant des fiancés, il lui arrivait de s’étonner des paradoxes et des imperfections qu’il constatait chez elle, comme il s’émerveillait de la pondération et de l’équilibre de sa sœur. Aussi le danger de ces dialogues, que Liette écoutait distraitement, quand elle ne les coupait pas d’un éclat de rire ou d’une réflexion baroque, était-il plus réel qu’elle ne l’imaginait. Et, moins indifférente à sa menace, elle se serait félicitée que ses affaires fussent si avancées.
Nise ne s’y trompait pas, elle, et ne laissait pas de s’effrayer un peu d’une sympathie qui lui était infiniment précieuse, mais qui ne pouvait se développer qu’au dam de Liette. Là était le péril, et un péril capable de ruiner d’autres vies que la sienne. Mais comment se soustraire au charme subtil et inespéré du curieux revirement qui s’opérait chez Mr. Wellstone et qui prouvait qu’en somme, dans son cas à elle, Denise, tout provenait d’un malentendu ?
Le courage lui en manquait. Et puis tout ne conspirait-elle pas contre elle ? Songeant que le jeune homme ne s’appartenait plus et que ni la religion, ni l’opinion, ni la conscience n’absolvent le parjure, elle se reprochait son intimité croissante avec lui, première ombre sur le soleil conjugal de Liette. Et elle aurait voulu pouvoir l’éviter. Mais on la poussait en quelque sorte vers lui, Mme Daliot aveuglément, parce qu’il n’eût pas été convenable que les fiancés sortissent seuls ; Liette elle-même, sans réfléchir suffisamment, quoique par calcul, pour garder près d’elle la sage conseillère qui lui avait été si utile dans sa conquête de Mr. Wellstone.
Bref, il était temps de se séparer, du propre aveu de Nise, qui, d’ailleurs, ressent cruellement le vide de ce départ des jeunes mariés. La maison, sans Liette, n’est plus la maison. Cette petite folle