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CYRANETTE

VII

Et maintenant tout est consommé. L’irréparable est accompli et Nise a bu la lie de son calice. Devant Dieu et devant les hommes, Liette est unie pour la vie à Robert !

S’il nous fallait tirer la morale de ce mariage, en tant que cérémonie, tenant compte de la déconvenue de Mme Daliot, mais aussi de l’état d’esprit de sa fille aînée, nous ne saurions rien faire de mieux que de reprendre à notre compte l’humaine et profonde sagesse du vieil adage : « À quelque chose malheur est bon. »

Cette mère a pu souffrir dans son légitime amour-propre de bourgeoise. Ce mariage a pu manquer de grandeur. Et il est vrai qu’il en eût été totalement dépourvu, sans le caractère d’élévation chrétienne qu’en officiant l’abbé Divoire a su donner à la cérémonie. Mais, en somme, au point de vue de Nise, ne valait-il pas mieux que tout se passât entre intimes et en toute simplicité ?

Après la formule sacramentelle de l’Ego conjungo vos in matrimonium et la présentation rituelle de l’anneau, quand M. le curé, faisant le signe de la croix sur les époux agenouillés, les a solennellement bénis, in nomine Patris, et Filii et Spiritus Sancti, puis, d’une voix qu’il s’efforça d’affermir, a psalmodié un émouvant Kyrie, eleison, Nise a chancelé sous sa croix et gémi, elle aussi :

— Seigneur, ayez pitié ! Christ, ayez pitié !

Mais sa croix ne l’eût-elle pas écrasée, elle l’incomprise, la douloureuse, la sacrifiée, si elle avait dû la porter tout un jour de pompe et de liesse, parmi les fleurs, l’encens et la musique, et les joyeux hosannas d’une foule d’invités ? Ce mariage sans faste et, pour parler comme Liette, sans