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CYRANETTE

cérébrale opère, revivifiant intensément les moindres souvenirs de ses propres fiançailles. Comme tout y avait été bien préparé, calculé et réglé, depuis la savante ordonnance de la première rencontre jusqu’à la minutieuse composition de son trousseau ! Et quel sage et harmonieux acheminement de son inexpérience vers le sacrement qui de la vierge fait une épouse !

On n’était riche ni d’un côté, ni de l’autre, mais on appartenait à de bonnes familles, respectueuses des saines traditions. Et, dans la fleur de ses dix-sept ans, quand, sous l’égide de sa mère, Germaine avait fait son entrée dans le monde où elle allait connaître M. Georges Daliot, alors tout jeune fonctionnaire, bien qu’une inclination secrète ne dût pas tarder à le lui rendre très sympathique, elle ne se fût pas permis de contrarier ses parents, encore moins de leur tenir tête, si, dans leur prudence et leur prévoyance, ils avaient cru devoir choisir pour elle un autre parti. Mais quel autre parti lui eût pu mieux convenir ? Georges l’aimait. Il avait d’excellentes manières, des qualités que le premier venu n’a pas, tout ce qu’il faut pour « arriver » dans l’administration. On ne pouvait donc le voir d’un mauvais œil, ni faire en sorte qu’il n’approchât point Germaine. S’il cherchait les occasions de la rencontrer, il y apportait d’ailleurs beaucoup de discrétion, savait s’effacer au besoin et attendre stoïquement de pouvoir échanger quelques mots avec elle sans qu’en souffrissent les convenances.

Mme Daliot revoit la bonne figure du vieil ami commun qui s’était entremis comme négociateur près de son père. Elle revoit Mr. Daliot père, en jaquette, haut de forme et gants chamois, se présenter à son tour pour la demande en mariage. Elle n’assistait pas à cette entrevue, il va sans dire. Mais rue de Derrière-les-Murs, quand un visiteur lirait la sonnette, on regardait par une persienne pour savoir à qui on avait affaire… Et puis, avant