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Et quand Nise a fini de la relire, cette triste lettre qui en évoque d’autres dont elle pensait mourir comme en est morte Mrs Wellstone, son abattement contraste avec le sang-froid de sa cadette, occupée de détails pratiques.

Il faut répondre pourtant et la collaboration des deux sœurs aboutit une fois de plus à l’une de ces pages que Robert sait si bien apprécier.

— Souffle-moi, veux-tu, Nise ? a supplié Liette.

Et Nise, d’un jet, lui a dicté ces quelques lignes :

« Je souffre avec vous et pleure avec vous, mon Robert, mais je vous crie courage, parce que tout en moi s’insurge contre l’idée impie que la mort puisse être la fin de tout. S’il en était ainsi, il vaudrait mieux ne jamais naître, puisque, trop souvent, vivre c’est souffrir. Dans sa justice, Dieu a voulu la souffrance. Dans sa bonté il a voulu le bonheur. Nos joies humaines sont trop fugitives pour compenser nos infirmités. Cette compensation, il nous faut l’attendre d’un monde meilleur et, bien souvent, ceux qui partent sont moins à plaindre que ceux qui restent.

« Soyez vaillant dans cette épreuve comme j’ai essayé de l’être dans la mienne, et tachez de remonter monsieur votre père, dont nous concevons ici toute la douleur. Que ne suis-je près de vous pour vous y aider de mon mieux ! Comme je l’aimerais aussi, ce pauvre et bon père, comme je m’appliquerais à lui plaire et à lui changer les idées !… »

Liette cesse un instant d’écrire.

— Parfait ! approuve-t-elle en connaisseuse. C’est simple et bien senti. Mais, en nous y appesantissant, nous risquerions de rater notre effet. Nise. N’es-tu pas de mon avis ? Moi je trouve que, pour nous changer les idées, il serait bon de parler d’autre chose. Robert réclame sans cesse de nos nouvelles. Il raffole de détails inédits. Accordons-