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qui n’avait pas permis au jeune homme de voir en Liette la petite chose frivole et fantasque dont il se méfiait. Ses légères incartades de la gare ne tiraient pas, en somme, à conséquence. Ce n’était là, pensait-il, que le faible de cette délicieuse enfant, aux spontanéités un peu paradoxales, mais non inquiétantes pour qui connaissait ses vertus foncières.

En ces vingt-quatre heures passées dans son intimité, la grâce de Liette — d’une Liette que les circonstances obligeaient de s’observer — n’avait pas démenti l’opinion qu’il s’était faite d’elle à travers des pages sublimisées par un grand et pur amour. Et il l’avait quittée, plus épris peut-être qu’il ne l’était en arrivant.

Nise s’en était rendu compte. Avec elle, il s’était comporté comme un frère qui en viendrait à se découvrir une sœur longtemps ignorée et pleine de grâce aussi. Il lui avait témoigné toute l’attention qu’il lui pouvait accorder en l’espèce et que son éducation raffinée savait nuancer à merveille. Mais elle n’avait pas d’illusions à se faire. Elle voyait bien que ce frère ne l’aimerait jamais que comme une sœur, alors qu’il aimait Liette tout autrement. Et, quoique le contraire ne fût ni possible, ni même désirable, maintenant que le sort en était jeté, c’était comme s’il avait retourné le fer dans la plaie. Mais si la souffrance était aiguë, lancinante comme aux plus mauvais jours d’avant le drame, l’antidote, à présent, se trouvait près du poison.

— Il vit ! se disait-elle.

Et qu’il vécût, lui dont elle avait cru pleurer la mort, cette heureuse réalité faisait contrepoids à l’écroulement définitif de son rêve.

Vers le mois de janvier, les nouvelles de Mrs Wellstone s’étaient faites de plus en plus alarmantes. Quand son fils l’avait rejointe, une certaine amélioration avait paru se produire dans son état, de sorte qu’on espérait presque un