cours de la joie de ce vieillard insouciant. Mais hélas, si immense que fut cette bouteille, elle se vida à force d’en verser.
— « Point de vin, point de joie ! » soupira-t-il d’une voix mélancolique. Il s’apprêtait déjà à s’en aller quand soudain une voix inconnue l’interpella derrière lui :
— « De grâce, restez avec moi encore un peu. Comment pouvez-vous rentrer déjà par une pareille soirée ! » criait en effet un autre vieillard comme lui à la barbe blanche tout en accourant vers lui.
— « Assurément c’est une excellente idée. Mais je n’ai plus de vin. Ma bouteille est vide. Comment égayer alors notre soirée sans ce nectar divin. »
— « Soyez tranquille, dit l’autre, nous en aurons à volonté. Reprenez seulement votre place au bord de cet agréable ruisseau. Et puis maintenant, prêtez-moi un instant votre bouteille vide, continua le nouvel arrivant tout en sortant ce sa poche une petite bille en pierre transparente qu’il introduisit dans la bouteille. Aussitôt ô miracle ! la bouteille se remplit toute seule d’un vin délicieux.
Au comble de joie, nos deux vieillards se passaient sans cesse à tour de rôle tantôt le gobelet tantôt la bouteille devenue soudain inépuisable, jusqu’à ce que la lune pâlit dans une aube lointaine.
— « Voyez-vous, noble ami, il suffit de verser la bouteille pour obtenir autant de vin que vous voulez. En souvenir de notre charmante soirée je vous laisse la bille ! »