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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

quand vous aurez mon âge vous comprendrez que vous avez vécu constamment trompés, car la vie n’est qu’une illusion et l’amour n’est qu’un mensonge ! À votre âge j’étais comme vous. Je défendais l’honneur des dames surtout celui de la mienne qui m’aimait d’un amour si profond et sincère que la mort elle-même, me semblait-il, ne pourrait nous séparer. À trente ans, je fus nommé préfet de Ko-Yang quand la Sil-Là déclara la guerre au Bec-Jai[1].

Or un jour les soldats de Sil-Là assiégèrent la ville de Ko-Yang dont la chute n’était plus qu’une question d’heures. Alors je dis à ma femme chérie que, étant préfet de cette ville, je devais garder ma place jusqu’au dernier moment, mais qu’elle devait me quitter le plus tôt possible. Ma femme protesta tout en larmes, en déclarant qu’elle ne me quitterait jamais et préférait mourir à côté de moi ! Enfin, en attendant les événements, nous nous jurâmes de nous rester fidèles quoiqu’il arrivât. Et en cas où nous serions séparés par les ennemis, non seulement nous devions toujours choisir la mort plutôt que d’endurer la honte, mais encore nous devions faire tout notre possible pour nous retrouver après la guerre, si nous étions encore vivants… etc…

  1. Avant la naissance de la « Corée », la péninsule coréenne était divisée en trois nations. Du sud au nord Sil-Là, Bec-Jai et Cocourieu. Cette période de division, qui a duré pendant sept cents ans, est connue en Corée sous le nom de Sam-Kouk ou Trois-nations. Ce n’est qu’après l’unification de la péninsule par Sil-Là qu’elle a reçu le nouveau nom de Corée.