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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

Avant l’aurore, en effet, le jeune marié put rejoindre sa femme qui l’attendait, l’air inquiet.

Le lendemain matin, les nouveaux mariés reparurent gais le plus naturellement du monde.

— « Jamais un couple aussi harmonieusement parfait, disait tout le monde, n’aurait existé ! »

La précaution de ce prudent jeune mari fut telle qu’on ignorait le moindre événement de la veille.

La vie leur fut douce. Les heureux jours se succédèrent ainsi que les heureuses années. Vingt années s’écoulèrent comme un matin, depuis leur mariage. Et pourtant elles n’avaient pas manqué d’accomplir leurs œuvres cruelles ! car un sommeil éternel avait fermé les paupières de leurs parents. Ce couple autrefois tout rose, tout florissant, devenu père et mère, voyait alors quelques fils blancs courir dans leurs chevelures.

Le souvenir fâcheux aurait été oublié durant cette heureuse vie trop courte, si un jour un jeune page n’avait pas demandé à son maître :

— « Seigneur, à moins que je ne fusse tombé du ciel, je dois avoir des parents qui m’ont donné naissance. Si vous ne savez rien de ma personne, daignez me dire quand et comment je fus recueilli par vous ».

Le visage du Seigneur devint sombre et pensif, une terrible colère qu’il dissimulait mal surgit tout-à-coup dans ses yeux, puis il répondit :