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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

sant le malheureux aveugle dans le sac qu’il boucla, ensuite avec toutes les peines du monde il réussit à l’accrocher à la branche du sapin. Puis l’enfant s’enfuit et rentra secrètement chez ses parents.

L’esclave qui se saoulait dans la salle de consommation de l’auberge, comme nous l’avons dit, en compagnie d’une vulgaire commère, sortit enfin, vers le soir. Sous l’empire de l’alcool il marchait d’un pas chancelant. Il décrocha le sac d’enfant sans se rendre compte de la différence de poids qu’il y avait entre un enfant de dix ans et un homme de quarante ans. Il se contenta de dire :

— « C’est lourd ! ce petit cochon là ! »

Puis le voilà reparti en zigzaguant et en chantant, avec le sac sur son dos, vers le fleuve fatal.

Le malheureux aveugle, qui avait vainement attendu la lumière, comprit enfin qu’un ivrogne l’emportait sur son dos en chantant et en zigzaguant. Il lui demanda qui il était et où il allait. Mais l’homme était tellement ivre qu’il n’entendait absolument rien. Et comme tous ses efforts pour obtenir de lui une réponse ne réussissaient pas, il se résigna à son sort, tout en espérant le retour de la lumière de ses yeux.

Cependant le cruel esclave continua son chemin et arriva enfin au bord de ce fleuve fatal où il jeta son sac sans le moindre trouble de conscience ! Au contraire il était heureux de s’être débarrassé d’un fardeau ! Il revint donc chez son maître et lui annonça fièrement qu’il avait bien accompli sa lugubre mission.

L’intelligent et habile enfant de Kim Sébang,