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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

personne et vous monterez en toute vitesse sur la colline de votre village. Surtout ne regardez pas derrière vous, sous aucun prétexte, avant d’arriver au sommet ! » insista-t-il d’un accent suppliant.

La jeune femme le prit d’abord pour un fou. Mais quand elle s’aperçut soudain que le vieux bonze avait disparu en un clin d’œil sans laisser aucune trace, elle commença par s’en inquiéter. Le lendemain à midi, en effet, elle vit à sa grande stupéfaction une source jaillir du sol, au milieu de la cour ; et bientôt elle grossit d’une façon inquiétante. Alors affolée la jeune femme se précipita dans sa chambre, prit son bébé sur son dos et ramassa quelques objets personnels dans un panier qu’elle mit sur sa tête et courut tout droit vers la colline.

Une rafale formidable surgit brusquement dans le ciel, une violente averse se précipita dans la vallée. Des bruits confus de torrents déchaînés se faisaient entendre bientôt derrière ses pas. C’est alors qu’elle s’est rappelée d’avoir oublié son adorable mari dans le château. Dès ce moment elle ne pouvait résister au désir brûlant de savoir le sort de sa maison conjugale. Presque arrivée au sommet de la colline, oubliant un instant le conseil du vieux bonze de la veille, la jeune femme regarda machinalement derrière elle. Elle ne put pousser qu’un seul cri d’horreur ! Elle ne vit aucune trace du château, ni de la vallée ! Ce n’était plus qu’un immense océan ! Devant ce spectacle terrifiant, elle fut littéralement clouée sur place et son corps glacé fut pétrifié à jamais. C’est l’histoire qu’on ra-