Page:Seu - Miroir, cause de malheur, et autres contes coréens, 1934.pdf/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

mon père, car un Roi est toujours assez bon pour comprendre que les contrebandiers sont difficiles à découvrir, surtout ceux du vin qui savent que leur crime est puni de mort. Et puis je n’ai jamais vu dans les contes de fées qu’un Roi condamne un homme innocent et bon comme mon père. Mon père aime beaucoup maman et moi. Il me raconte souvent des contes de fées, que les Rois envoient chez nous pour s’informer de notre conduite à la maison. Je sais que vous n’aimez pas les enfants désobéissants. Je serai désormais plus sage que jamais, rendez-moi mon père ! dit-elle tout en se mettant à genoux.

Le Roi, généralement inexorable aux plus touchantes supplications, ne put s’empêcher de se laisser attendrir par ces bavardages innocents et naïfs d’une toute petite fillette.

— « Quel âge avez-vous ? et qui est votre père ? » demanda-t-il avec un sourire amusé.

— « Sire, j’ai sept ans et je suis la fille aînée de Liou Jin-Hang. »

— « Liou Jin-Hang ! Il est déjà condamné ! et je n’y puis plus rien » dit le Roi tout à coup rouge de colère.

À cette nouvelle terrible, la petite fillette éclata en sanglots si douloureux qu’il semblait fendre le cœur de tous ceux qui l’écoutaient. Le Roi lui-même en fut fort ému et ordonna la mise en liberté immédiate de Liou Jin-Hang en disant que :

— « Les larmes naïves et innocentes d’un enfant sont plus puissantes que la loi d’un Roi de la Corée. »