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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

son mari rentrer pâle et sans force lui demanda :

— « Qu’avez-vous donc, pourquoi êtes-vous si pâle ?… »

Il lui répondit, pour dissimuler son inquiétude et sans aucune arrière-pensée :

— « Vous savez combien j’aime le vin ! La longue et pénible privation de cette boisson affaiblit ma santé et j’en souffre aujourd’hui ! »

— « Ah, il vous faut donc du vin pour retrouver votre santé ! Eh bien ! je sais où en acheter. Mais si je n’y allais pas moi-même il serait difficile d’en obtenir ! » dit-elle tout en sortant de la maison avec une bouteille.

Liou Jin-Hang suivit secrètement sa femme. Celle-ci se dirigea vers un village voisin de l’Est et entra dans une pauvre chaumière. C’était là qu’elle achetait du vin ! Liou Jin-Hang retourna aussitôt chez lui, avant sa femme, et l’attendit. Bientôt elle rentra et offrit à son mari la bouteille remplie du vin. Il en but un bol, d’un air heureux. Puis il boucha la bouteille qu’il mit dans sa poche tout en se préparant tranquillement à sortir. Sa femme très étonnée, vu surtout l’heure tardive, lui demanda où il allait et pourquoi il emportait la bouteille avec lui. Il lui répondit le plus naturellement du monde :

— « Dans la ville j’ai un ami intime qui aime, comme moi, le vin et avec qui j’ai souvent bu du vin. Et aujourd’hui en voyant cette précieuse et rare boisson je ne puis m’empêcher de penser à lui. Je vais le voir pour partager avec lui ce plaisir. »

La femme de Liou, heureuse, d’ailleurs, de voir son mari content, lui souhaita une bonne soirée.