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MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

aurait été affectée au dépôt des armes. Bref, ce qui nous importe de connaître pour le moment c’est qu’à l’époque où se place notre histoire, ce bâtiment servait de grange ou d’entrepôt commun à tous les habitants du village.

Or, il existait dans ce pays, on ne savait trop depuis quand et comment, une terrible superstition : On offrait annuellement en sacrifice une victime humaine au Dieu-Gardien de cet entrepôt. On fixait une date, de préférence, dans les premiers jours du printemps, on dressait, au milieu de l’entrepôt, un autel sacrificatoire sur lequel on posait, comme victime une jeune fille, ayant les membres solidement liés. Après les cérémonies d’usage qui consistaient en des révérences classiques, tout le monde se retirait, laissant seule sur le sinistre autel la malheureuse victime. Puis l’on fermait à clef l’énorme portail de l’entrepôt.

Ce qui est plus mystérieux encore, c’était qu’en rouvrant ce portail, on constatait que la victime avait disparu sans laisser aucune trace. Et si l’on n’offrait pas ce sacrifice annuel, on était sûr d’avoir, au cours de l’année, de terribles malheurs emportant des centaines de vies humaines ! Ajoutons qu’il n’était point aisé à cette malheureuse communauté de trouver tous les ans la victime indispensable !

Justement, on était au seuil du printemps. On cherchait partout avec une terrifiante inquiétude, une jeune fille. La petite Bok-Sury était au courant de cet événement et elle savait aussi la somme considérable dont on disposait pour obtenir une victime.