Page:Seu - Miroir, cause de malheur, et autres contes coréens, 1934.pdf/112

Cette page a été validée par deux contributeurs.
108
MIROIR, CAUSE DE MALHEUR

vêtement. On ne lui donnait pour toute nourriture qu’un bol de riz cuit à l’eau par jour. De longs poils couvraient maintenant son corps tout entier. Il n’avait plus aucune apparence d’un être humain. Bref, c’était un vrai singe phénoménal qui ne savait pas même pousser un cri.

On le sortit un jour, je ne sais à quelle occasion. La vue de cet animal peu ordinaire suscita la curiosité de la foule. Et la nouvelle se répandit bientôt dans tout le pays, et tous les jours des curieux arrivèrent de toutes parts pour le voir.

Tchai Kun-Sin, le nouveau préfet de Tai-Kou, encore très jeune et curieux, fit amener un jour le singe phénoménal. À la vue du préfet le singe se mit tout à coup en grande agitation, et de grosses larmes ruisselaient de ses yeux comme des torrents. Le préfet ému de cette scène se demanda : « Comment un animal peut-il pleurer si pathétiquement ! »

Cependant les agitations de plus en plus bizarres et expressives du singe laissa le préfet tout rêveur. Il ordonna aussitôt au dresseur de laisser libres les membres de cet animal. Alors l’animal fit nettement voir qu’il pouvait entendre sans pouvoir parler.

— « Êtes-vous un homme ? » lui demanda le préfet.

L’animal fit signe que oui.

— « Pouvez-vous écrire ? »

L’animal fit encore signe que oui. Le préfet lui fit aussitôt attacher un pinceau au bout de son bras tondu et puis on lui présenta une grande feuille de papier. Alors l’homme écrivit qu’il se nommait Tchai Du-Bon, fils de Tchai