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CARNETS

Régime d’isolement presque absolu, bonne bibliothèque, bonne alimentation, pas de sévices. Promenade à deux au bout d’un certain temps. Correspondance très rare : des prisonniers au secret en sont privés et ne voient jamais personne. Ce serait un des meilleurs isolateurs, réservé à des « personnalités ».

G. L. a rencontré là :

Le Français Léger, agent secret à Sofia au moment de l’attentat de la cathédrale (1924), réclamé ensuite par l’U.R.S.S. — devenu fou. S’est jeté du haut d’un escalier en criant : « Je m’évaderai, je ne vous ferai pas grâce, moi », etc.

Le trotskiste Tchékan, d’un grand courage. Ses camarades et lui manifestaient lors des fêtes de la révolution. Tant qu’ils ne criaient rien contre Staline, on ne les brutalisait pas. La moindre allusion à S. entraînait des sévices.

Le frère de Kaménev, Rosenfeld, peintre, et sa femme. Ils avaient été impliqués dans une affaire de terrorisme à la suite de laquelle le chef de la garde du Kremlin, Peterson, et plusieurs de ses hommes furent fusillés en 35. (Des échos de ce procès secret « de la garde du Kremlin » parvinrent jusqu’à moi et j’ai mentionné le fait dans Destin d’une Révolution. Cette affaire est à l’origine de la psychose de complot qui entraîna les procès de Moscou. Kaménev y fut jugé en même temps que son frère et condamné à 10 ans de réclusion, ce qui semble bien une attestation d’innocence.)

Le communiste polonais Dombrovski — député ? (IL pourrait y avoir erreur de nom.)

Un Polonais, Tourjanski.

Un Turc, membre du Comité Central du P.C. Turc.

Des membres du C.C. du P.C. chinois.

Le socialiste révolutionnaire de gauche Kamkov — emprisonné depuis 1918.

L’ancien (récent) Président du Soviet de Léningrad, successeur de Zinoviev, Kondratiev.

Se trouvaient également à Yaroslavl :

Le vieil économiste menchévik Bazarov.

Gvosdiev, membre du ier Soviet de Pétrograd en 1917.