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vais vous bailler une comparaison. Le capitaine Harry vous dit : J’ai vu une nuit le ciel tout enflammé. Je croyais voir un immense feu d’artifice, des fusées de toutes les couleurs, etc., etc. Le fait vous plaît, et comme vous faites un roman dont la scène est dans l’Amérique méridionale, vous l’insérez dans le moment le plus pathétique, celui où votre héroïne est égarée dans les savanes de Cazanare, république de Colombie. À l’instant cette seule circonstance rend le fait qui n’était qu’extraordinaire, impossible, vu qu’on ne voit pas d’aurores boréales si près de la ligne équinoxiale. Je crois que Mme Azur n’a pu faire que ce qu’elle a fait, et si son caractère pouvait être analysé et connu, on y trouverait l’explication de sa vie, mais non celle de beaucoup d’autres actions assez semblables aux siennes que vous pourriez lui prêter. Moi qui ai la bosse de la sagacité comparative suivant Gall, je m’imagi-