Chansons, où s’épanouit le charme naïf et doux de la poésie populaire.
Maeterlinck aurait pu devenir un grand artiste en vers ; il a préféré suivre
une autre voie. Faut-il le regretter ? Assurément non. Qu’aurait-il pu faire
de mieux que ses chefs-d’œuvre en prose ?
Sous la cloche de cristal bleu
De mes lasses mélancolies,
Mes vagues douleurs abolies
S’immobilisent peu à peu :
Végétations de symboles,
Nénuphars[2] mornes des plaisirs,
Palmes lentes de mes désirs,
Mousses froides, lianes molles.
Seul, un lys érige d’entre eux,
Pâle et rigidement débile,
Son ascension[3] immobile
Sur les feuillages douloureux.
Et dans les lueurs qu’il épanche
Comme une lune, peu à peu,
Élève, vers le cristal bleu,
Sa mystique prière blanche.
Sous l’eau du songe qui s’élève,
Mon âme a peur, mon âme a peur !
Et la lune luit en mon cœur
Plongé dans les sources du rêve.
Sous l’ennui morne des roseaux,
Seuls les reflets profonds des choses,
Des lys, des palmes et des roses
Pleurent encore au fond des eaux.
Les fleurs s’effeuillent une à une
Sur le reflet du firmament,
Pour descendre éternellement
Dans l’eau du songe et dans la lune.