Car, d’une part, fondé sur la foi à la transmigration, le bouddhisme prétend avant tout donner les moyens de se soustraire au cycle des renaissances, par conséquent de se soustraire à la mort, mâra ; et, d’autre part, sa morale repose sur cette idée fondamentale que c’est la destruction de ces liens de la concupiscence par lesquels nous sommes rivés et ramenés à la vie, la suppression de la « Soif » ou du « Désir », du kâma enfin, qui assure seule cette délivrance. Sous ce jour, « Mâra » et « Kâma » ne font vraiment qu’un, et l’on a bien raison de dire qu’il y a là toute une allégorie qui est rigoureusement conforme aux principes du système.
Est-ce à dire que le bouddhisme l’ait créée de toutes pièces ? Il a pu tout aussi bien incliner à ses fins une tradition que lui léguait le passé et dont il lui fallait éteindre les dissonances. Nous n’en pouvons décider qu’en remontant aux origines. Mâra est d’ailleurs une figure religieuse intéressante, comme un autre Satan, à qui plusieurs croient reconnaître une parenté directe avec celui de notre tradition chrétienne. Son histoire vaut sans doute d’être esquissée.