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de leur père. Nous savons pourquoi. De part et d’autre se dresse entre les époux un obstacle irréductible, l’inégalité religieuse.

Suivant Manou[1], les dieux ne mangent pas l’offrande préparée par une çûdrâ. À Rome, il suffit de la présence d’un étranger au sacrifice de la gens pour offenser les dieux[2]. La çûdrâ est une étrangère ; elle n’appartient pas à la race qui, par l’investiture du cordon sacré, naît à la plénitude de la vie religieuse. Et, s’il est loisible aux hautes castes, à côté de la femme légitime et de plein droit, d’épouser une çûdrâ, encore l’union doit-elle être célébrée sans les prières consacrées[3]. Dans la conception âryenne du mariage, les époux forment le couple sacrificateur attaché à l’autel familial du foyer. C’est sur cette conception commune que repose en dernière analyse l’endogamie de la caste hindoue, comme les limitations imposées à la famille classique.

Il est interdit de manger avec des gens d’autre caste, d’user d’alimens préparés par des gens de caste inférieure. C’est une des bizarreries qui nous surprennent. Le secret n’en est pas impénétrable. Il faut songer au rôle religieux que, de tout

  1. III, 18.
  2. Fustel de Coulanges, La Cité Antique, p. 117.
  3. Ind. Stud., X, p. 21.