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ches ; mais l’observation est, à mes yeux, de grande importance, et les pièces justificatives ne sont pas loin.

Nous allons constater que la légende du Buddha ne représente pas une simple agrégation de contes plus ou moins étranges, groupés par les caprices de la fantaisie populaire, comme serait, je suppose, une collection de jâtakas. Elle n’est pas un assemblage d’emprunts disparates. Elle offre au contraire tous les caractères d’une unité, non point imposée aux épisodes mais inhérente à leur origine, non point arbitrairement réalisée dans le Buddha, mais supérieure à sa personne. Je la définirai plus exactement tout à l’heure. Il suffit ici de remarquer qu’elle établit entre toutes les parties essentielles une cohésion étroite, qu’elle suppose un ensemble préalablement établi. Elle implique par conséquent que tous les éléments principaux de la biographie prétendue ont reçu en même temps, ou à peu près, leur affectation buddhique.

Je voudrais donner à cette considération le plus de netteté possible dans l’esprit du lecteur. Des exemples m’y aideront. Je crois pouvoir démontrer qu’il existe, entre le titre et la fonction de Cakravartin, le nom et les attributs de Purusha, la maternité de Mâyâ, le Cakrapravartana, une corrélation étroite ; que la légende du Kṛishigrâma, le nom de la femme du Bodhisattva, l’hospitalité de Nanda et de Sujâtâ, la lutte contre Mâra et la prise de possession du Bodhidruma, sortent pareillement d’une source unique d’inspiration ; et en même temps les deux groupes remontent à une unité commune : le premier reflète les attributs et la légende de Vishṇu-Nârâyaṇa, le second se rattache plus spécialement à l’histoire de Kṛishṇa. Il est clair, en admettant bien entendu que