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manquent les dates précises, nous pouvons faire notre profit de preuves, qui, pour être plus ou moins directes, n’en sont pas moins décisives. À cet égard les deux questions de l’âge des traditions et de la valeur relative des sources sont étroitement connexes ; l’examen en est, à vrai dire, inséparable.


Des indices concordants ressortent de deux ordres de faits, les uns empruntés à la tradition littéraire, les autres aux monuments figurés.

En ce qui touche les livres, il est fâcheux que le canon pâli dont la fixation par l’écriture parait remonter assez haut et qui jouit dans l’opinion savante d’un si vif prestige, ne nous soit pas encore complètement accessible. Dès maintenant il est visible par une infinité d’allusions qu’il implique la préexistence dans tous ses traits essentiels de ce que j’appelle la légende du Buddha. Le Buddhavaṁsa, par exemple, n’en contient pas un récit explicite ; mais non seulement il connaît tous les noms propres, non seulement il suppose les scènes décisives ; la composition d’un pareil livre n’était possible qu’après que le type dogmatique du Buddha était parfaitement arrêté, qu’il était multiplié déjà en un nombre de représentants indéfini. La légende typique, qui est proprement la légende du Buddha, était donc antérieurement fixée ; car nous verrons que cette multiplication des Buddhas est empruntée au même cercle de notions religieuses et légendaires auquel est empruntée la légende elle-même. On n’a jamais fondé sur des faits une preuve véritable de nature à démontrer, malgré la date de leur rédaction dernière, que les développements fournis par Buddhaghosha ne sont pas dans tous