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être considéré comme de l’histoire avérée. Je voudrais montrer que, à cette manière de voir, il convient décidément de substituer la seconde.

A priori les deux sentiments se peuvent défendre. L’alliage merveilleux n’est pas plus démonstratif contre la valeur historique des autres parties, que ne l’est, contre l’interprétation mythologique, la présence d’un certain nombre de traits irréductibles, dont le caractère possible, réaliste, ne justifie à première vue aucun soupçon. Il n’y a point d’histoire qui n’ait ses légendes ; il n’est point de légende que l’evhémérisme ancien ou moderne n’ait, à son heure, érigée en histoire véridique. La distinction est essentielle à établir. Elle ne se peut établir que par une analyse minutieuse.

Si nous parvenons à montrer que tous les éléments essentiels de la légende, loin d’être uniques et originaux, trouvent soit une contre-partie exacte, soit des points d’attache évidents dans des traditions certainement indépendantes et sûrement mythiques, il est clair que les premiers soupçons gagneront singulièrement en précision et en autorité.

Encore pourrait-on imaginer qu’un certain nombre de fictions aient été empruntées au trésor commun des traditions légendaires et mêlées à la trame d’un récit foncièrement historique. Mais si des comparaisons du détail il ressort que tous les emprunts ont été faits à un même cycle religieux, qu’il règne dans l’ensemble une unité réelle, que cette unité a ses racines dans le passé de ces légendes appliquées tardivement au Buddha, il ne pourra plus être question d’accident ni d’arbitraire, il faudra reconnaître que, dans son ensemble, et quelques souvenirs authentiques qui aient pu s’y glisser, la légende du Buddha ne représente pas une vie véritable, même colo-