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exclamation ; qu’ils en exigent si sévèrement des femmes, après avoir passé leur vie à tâcher de les leur ôter ; et qu’ils les méprisent toutes, parce que plusieurs d’elles ont eu le malheur de ne pas les mépriser eux-mêmes. C’est une petite hypocrisie dont je crois même qu’ils ne s’aperçoivent pas. C’est davantage encore, et bien plus communément, un effet de la dépravation de leurs goûts, des excès de leurs habitudes et du désir secret de trouver une résistance sérieuse pour avoir la vanité de la vaincre ; c’est une suite de l’idée que d’autres ont probablement joui des mêmes faiblesses, et de la crainte qu’on leur manque à eux-mêmes, comme ils sont parvenus à faire manquer à d’autres en leur faveur.

Lorsque les années font qu’ils n’ont plus d’intérêt à introduire le mépris de tous les droits, l’intérêt de leurs passions, qui fut toujours leur seule loi, commence à les avertir qu’on violera ces mêmes droits à leur égard. Ils ont contribué à faire perdre les mœurs sévères qui les gênaient, ils déclament maintenant contre les mœurs libres qui les inquiètent. Ils prêchent bien vainement : des choses bonnes recommandées par de tels hommes tombent dans le mépris, au lieu d’en recevoir une nouvelle autorité.

Aussi vainement quelques-uns disent que s’ils s’élèvent contre des mœurs licencieuses, c’est qu’ils en ont reconnu les dangers. Cette cause, quelquefois réelle, n’est pas celle à laquelle on croit, parce qu’on sait bien qu’ordinairement l’homme qui a été injuste, quand cela lui était commode pendant l’âge des passions, ne devient juste ensuite que par des motifs personnels. Sa justice, plus honteuse que sa licence même, est encore plus méprisée, parce qu’elle est moins franche.

Mais que des jeunes gens soient choqués subitement et avant la réflexion par des choses dont la nature est de