Page:Senancour - Rêveries sur la nature primitive de l’homme, 1802.djvu/346

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 336 )

moteur pris hors de lui-même. De l’indifférence et de l’apathie dans lesquelles il doit tomber naturellement. Supériorité d’une impulsion rapide et involontaire sur un effort raisonné. Inconséquence de cette morale qui cherche à éteindre les passions, et veut ensuite de la force et du zèle. Sans les passions il n’est point de morale. Dans la vie morale comme sur les mers, un calme absolu est plus funeste que la tempête. Effets de cet état de découragement et de dégoûts. Difficultés d’y remédier même par la philosophie. Différence entre la vie du zélateur de la sagesse et celle de l’homme désabusé et fatigué de toute chose.

Effets des occupations habituelles. Effets du goût de l’ordre appliqué constamment aux petites choses. Notre cœur cherche, quelque part que ce soit, un mobile auquel il puisse se livrer. Les lois sont fondées sur la nécessité de donner à tous une détermination d’ensemble, et de n’être pas dans une perpétuelle délibération. Il faut que les institutions soient telles que la raison puisse s’abandonner à leurs suites naturelles, et que l’intérêt individuel aime à s’y abandonner.

Du génie. Du génie de l’instituteur des peuples. Il réunit l’étendue, l’ordre et l’énergie. Il ne peut être dans l’ordre social, qu’un seul objet digne d’une grande ame. Le sage aime à se circonscrire, mais si son génie et les circonstances lui permettent de servir les hommes, il ne peut s’abandonner au repos philosophique. Du sentiment profond d’ordre et d’harmonie qui caractérise le sage. Il est inaccessible à toute prévention. Il juge les choses selon leur nature