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par l’union des semblables : voilà sans doute la différence caractéristique entre ses opérations sublimes et nos puérils essais. La perfection de l’art humain est de parvenir par un seul moyen à un effet complexe ; celle de la nature, de rapporter à un effet unique, mais général, une incalculable multitude d’efforts dirigea dans deux voies contraires.

Si l’essence du feu élémentaire est le mouvement, j’admettrois par cette seule raison un autre élément, dont l’essence seroit de n’être point mu par lui-même. Mouvement et vie sont synonymes[1], dit-on ; je le croirois ainsi ; je croirois encore que tout composé est organisé, et que tout corps organisé est sensible ; mais je ne saurois concevoir que vie et existence soient synonymes ; au contraire, j’imagine sans peine un atôme élémentaire absolument inactif, comme, malgré Berkeley, je conçois aussi qu’il puisse exister[2] sans être

  1. Feu, mouvement et vie sont synonymes, voilà l’élément principe. Ils sont dans tout être organisé, et y produisent la sensibilité. Tout être organisé est nécessairement composé, tout composé réunit nécessairement les deux élémens ; le mouvement, la vie, la sensibilité appartiennent donc à tout composé.
  2. Voyez second Entretien d’Hylas et de Philonoüs.