être essentiellement opposées et sans que l’une prépare pour l’autre les fléaux qu’elle en reçoit, ne faudroit-il point détruire cette funeste distinction en ne formant les hommes qu’à ce qu’ils peuvent tous également atteindre ; car ce qui n’est accessible qu’à un petit nombre est nécessairement funeste à tous ; et cette industrie qui produisant quelques biens à la vérité, conduit à des maux beaucoup plus grands, ne peut être excusée quelque séduisante[1] qu’elle paroisse. Les arts subtils, les recherches et les études profondes, les entreprises mémorables, ces choses si grandes, ces titres si vantés de la gloire humaine, ne paroîtroient-ils à l’intelligence impartiale qu’une laborieuse puérilité ? et ce roi de l’univers, en ses perpétuelles sollicitudes, ne seroit-il devant elle que le plus misérable et le plus ridicule des êtres animés, dont un même moment de la nature
- ↑ Le plus bel esprit de l’Europe, mais le plus français des philosophes, a vanté le luxe et les arts. Ce n’est pas en cela seul qu’il a flatté son siècle, et dit aux hommes bien moins ce qu’ils eussent eu besoin d’entendre que ce qui pouvoit donner à l’auteur une prompte renommée. Il me semble qu’il a, plus que tout autre peut-être, corrompu la philosophie, malgré ses grands succès pour avancer son règne.