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objet éloigné, afin que de fréquens avertissemens les excitent à propager, selon leurs moyens, l’agitation générale. Ce mouvement aura néanmoins des bornes dans les différentes parties de l’espace. Des forces extrêmes, des forces égales en sens contraire resteraient suspendues : si les produits de l’ordre n’étaient pas variés l’ordre n’existerait pas.

» Les causes finales limitées, celles que nous pouvons admettre avec quelque vraisemblance deviendront des moyens pour une fin plus importante. Si dans la partie de l’univers dont nous avons de faibles notions, cette fin paraît être la plus grande somme du mouvement, ce n’est encore qu’un résultat subordonné. Prétendrions-nous deviner le but de ce travail perpétuel ? Ici les probabilités sont inaccessibles, et nous ne trouverons pas d’analogies qui nous satisfassent : le monde presque entier sera toujours inconnu de l’habitant de la terre. Les doctrines secrètes ne furent que des emblèmes, des mythes, des figures utiles peut-être, ou même ingénieuses, mais que la vraie science rejetterait… »

Qu’y a-t-il donc qui nous soit accordé ? De jouir de notre étonnement même, de nous féliciter d’avoir déjà entrevu l’infini comme dernière conjecture, de sentir que notre intelligence pourrait s’élever durant des siècles innombrables !