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LE NOTAIRE JOFRIAU

seigneurs de Varennes s’éveille dans une aube enveloppée de l’épaisse buée qui roule sur les champs jaunis et se masse à l’orée du bois. Les ondes grises du grand fleuve semblent s’immobiliser dans l’indécise lumière de l’aurore ; un clapotis léger décèle pourtant son inflexible marche vers l’Océan.

Le dernier grillon depuis longtemps s’est tu. Sur les branches que l’automne empourpre, les oiseaux dorment encore. Le soleil monte lentement. Sous les flèches d’or qui s’allongent et se réchauffent, la nuit replie ses dernières brumes qu’elle abaisse sur les sillons dépouillés de la moisson blonde. Et ses rayons victorieux versent enfin une incomparable splendeur sur ce coin pittoresque de la Nouvelle-France.

L’on s’agite déjà autour de la maison de René Jofriau que le sommeil, dans sa course nocturne, semble avoir oubliée. La cognée pourtant, ce jourd’hui, demeurera silencieuse ; les bœufs rumineront tranquilles dans l’étable et le soc brillant de la charrue ne déchirera pas la terre, en vue des guérets d’automne. Ce n’est pas pour l’habituelle journée de labeur que l’activité règne, si matinale, dans la ferme. Michel et Marie-Josephte s’uniront dans quelques heures ; c’est cet évènement heureux qui fait que l’on s’affaire ainsi, chez les Jofriau avant que le soleil embrase l’horizon et que les premiers bruits de la nature saluent l’aurore.