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sans parler ; ils écoutaient à peine tant ils étaient impressionnés de l’excellence des mets et de la bonté des vins ; ils mangeaient et reprenaient de tout ; leur embarras était entièrement dissipé, ils se sentaient heureux et honorés. Mme Anfry ruminait dans sa tête la position honorable qu’allait lui faire dans le pays ce repas donné par elle, chez elle, à ses maîtres. Dans son extase intérieure, elle oubliait que le comte avait tout fourni ; elle se figurait avoir régalé le comte et la comtesse, et pensait que l’honneur qui lui en revenait n’était qu’un juste payement de la peine que lui avait donnée l’organisation du repas.

Le dîner fini, le comte et la comtesse allèrent s’asseoir sur un banc devant la maison, après avoir donné ordre à leurs gens de laisser aux Anfry tout ce qui restait des mets et des vins divers, ce qui redoubla la joie et la reconnaissance de Mme Anfry.

Les enfants examinèrent avec intérêt la bibliothèque que le comte avait donnée à Blaise, en tête de laquelle figure avec honneur un superbe volume de l’Imitation de Jésus-Christ, donné par Hélène. Après avoir lu le titre de tous les ouvrages, au nombre de cent, Jules dit à Blaise :

« Mon cher Blaise, je ne t’ai pas encore fait mon petit présent ; le voici ; accepte-le comme la preuve d’une amitié qui durera aussi longtemps que moi. »